81 km, un tutu et une canicule : récit du Trail de Saint-Jacques 2025
S’inscrire à une course presque un an à l’avance, ce n’est pas trop mon style. Mais là, en septembre dernier, j’avais coché ce Trail de Saint-Jacques 100K (en réalité 81 km pour 3400 m de D+) avec envie. Après un 50k en 2024 dont je gardais un super souvenir, le parcours me plaisait, la date aussi. Et depuis Lyon, c’était facile à organiser.
Enfin… jusqu’à ce que je déménage à Porto.
Un dossard, un déménagement, et des hésitations
Oui, la vie va vite parfois. Nouveau départ au Portugal, nouveau quotidien. Et avec ça, une petite question qui a commencé à me trotter :
"Est-ce bien raisonnable de retourner en France juste pour une course ?"
J’ai tenté ma chance auprès de l’organisation pour un report à l’année suivante. Refusé. Ce que je comprends : pas d’exception, une règle est une règle.
Mais je vous laisse juger… Tout le monde ne fait pas un déménagement international entre l’inscription et la course non plus.
Finalement, après de longues hésitations et malgré un nombre de congés très limité (salut la vie pro), je décide quand même d’y aller. Un peu par défi, un peu par fidélité à ce trail que j’apprécie vraiment, et peut-être aussi… pour me prouver que c’est encore possible, même en vivant à 1500 km.
Un road-trip express direction Le Puy-en-Velay
Je pars jeudi soir, après le boulot, direction Le Puy. Objectif : arriver avant 21h pour récupérer mon dossard.
Spoiler : j’y arrive. Après 1500 km de route, autant vous dire que ce ne fut pas la journée la plus reposante du monde – mais au moins, pas d’effort sportif la veille ! (C’est déjà ça.)
La météo annonce de la chaleur. Le "pack chaud" est activé. Je n’ai pas tout ce qu’il faut… mais sur la route, je déniche une casquette saharienne conforme aux critères, j’ai mes lunettes de soleil et de quoi transporter 2 litres d’eau. C’est bon, j’ai survécu à la checklist. Ready.
Dossard récupéré, petite surprise, et préparation du camp de base
La récupération du dossard est fluide, bien organisée, avec le petit village course habituel.
Je passe devant quelques stands, notamment celui d’un camel bag qui me faisait de l’œil… mais la voix de la raison (et celle du prix de l’essence) m’en détourne. Je repars avec mon dossard, une poignée d’infusions Pagès (ça change des lentilles du Puy !), et une surprise : je suis en vague 1. Pas si mauvais, hein !
Je file à l’auberge de jeunesse pour me reposer, préparer mon sac, et dormir un peu. Réveil à 5h45, navette à 6h15.
Le destin (et Porto) dans un bus au petit matin
Dans le bus, encore un moment inattendu : tranquillement installé dans le bus s’installe a côté de moi….un Portugais. De Porto.
On discute, échange de contacts, il fait partie d’un club local. Peut-être une future collab, qui sait ? Le monde est petit, et le running crée toujours des ponts inattendus.
Arrivés à Monistrol-d’Allier à 6h45 pour un départ à 8h30, on se dit qu’on va devoir patienter. Heureusement, l’organisation permet d’accéder à un ravito commun avec les ultra-traileurs déjà en course. Et surtout : du café. C’est pas grand-chose, mais à 7h du matin, ça change tout.
8h30 – Départ dans la fournaise
Il fait déjà chaud. Très chaud. Dès les premiers kilomètres, on attaque une belle montée qui étale le peloton. C’est raide, mais efficace. Rapidement, on se retrouve sur des monotraces où quelques bouchons apparaissent, mais rien d’insurmontable.
Le parcours est très agréable, bien balisé, peu technique mais jamais monotone. Des bois pour l’ombre, des champs pour la vue, et ce petit sentiment d’être vraiment ailleurs, déconnecté. C’est une belle région, l’Allier, que je connaissais peu et qui mérite clairement d’être explorée plus souvent, à pied ou en baskets.
Des ravitos au top (et des combos très personnels)
L’organisation UTMB, on peut lui reprocher certaines choses, mais pas ça. Les ravitos sont excellents. Bien placés, bien fournis, bien animés. Sucré, salé, produits Naak (barres, gaufres, électrolytes), eau et coca… le buffet est complet à chaque arrêt.
Et pour moi, un classique personnel : pain d’épice + jambon blanc. Un duo que certains jugeront étrange, mais qui me donne toujours un coup de boost.
Un moment critique… sauvé par un enfant et une fontaine
Un seul passage m’a vraiment mis en galère : après une longue montée, plus une goutte d’eau dans les gourdes.
Et là, miracle : un village, une fontaine, et surtout, un gamin qui passait sa journée à remplir les flasques des coureurs. Ce petit héros mériterait une médaille. Merci à lui !
Du roulant pour relancer… et une petite chute (obligatoire)
À partir du 55e km, le plus gros du D+ est derrière nous. On passe en mode “relance”, et là je me régale. Ce type de terrain me convient bien : pas de grosses pentes, pas de descentes casse-gueule. Je déroule, je cours, je me sens bien. Mieux que prévu.
Jusqu’à la chute. Parce qu’il faut bien que ça arrive. Heureusement, je tombe proprement, sur le côté, sans bobo. Juste de quoi me rappeler de rester concentré.
Le final, le tutu, la cathédrale et la limonade
Les derniers kilomètres passent vite, malgré la fatigue. Beaucoup de spectateurs sur les bords, et grâce au prénom bien visible sur le dossard, beaucoup de soutien personnalisé. Mon tutu (merci Miles&Vibes) attire les sourires. Et moi, j’avance, porté par cette ambiance.
La montée finale vers la cathédrale du Puy est toujours un moment à part. Une arrivée solennelle, presque religieuse. Je franchis la ligne.
Pas de frontale. Objectif rempli.
Le petit bonus : la rencontre avec une voix familière
Sur la zone d’arrivée, je tombe sur Nicolas Fréret, du podcast La Bande à D+, que j’écoute souvent pendant mes sorties longues. Et justement, je l’avais dans les oreilles pendant ce trail. L’entendre “en vrai”, c’était un petit moment bonus inattendu.
Bilan : je me suis surpris (en bien)
J’avais deux objectifs :
Récupérer des Running Stones pour ma tentative à la CCC 2026 ;
Ne pas sortir la frontale.
Check. Check. Et mieux encore : je termine 69e sur plus de 1000 participants. Plutôt propre. Seul vrai bémol : le matériel obligatoire. Vestes de pluie obligatoires malgré 30°C, et clairement, tout le monde ne joue pas le jeu. Quand tu portes 5 kg de matos parce que tu respectes les règles, et que tu vois des sacs minimalistes à la volée… tu te poses des questions.
Mais bon. Le sourire des bénévoles, les paysages de l’Allier, le bonheur de courir en tutu sous le soleil… Ça, personne ne peut te le voler.
Et après ?
J’aime ce trail. Ce n’est pas la haute montagne, mais c’est un terrain que j’aime : roulant, accessible, bien organisé, avec une vraie ambiance. Et les logements autour ne coûtent pas un bras, ce qui est à souligner.
Est-ce que je reviendrai un jour pour le 100 miles ? Peut-être.
Mais pour l’instant, je garde juste en tête cette belle aventure. Ce trail qui m’a demandé beaucoup avant même de commencer, mais qui m’a offert une grande récompense : celle de me sentir vivant, libre… et pas si rouillé malgré la chaleur et les kilomètres.
PS : Si toi aussi tu veux découvrir une ville autrement, viens courir avec moi à Porto ! On ne fait pas 81 km, mais je promets des paysages, des histoires, et quelques surprises.